Les modèles sont un élément essentiel du développement et du partage du savoir scientifique, et ils existent depuis aussi longtemps que les scientifiques s’expliquent leurs idées les uns aux autres (Figure 1). Les modèles sont essentiels, car la science implique souvent de travailler sur des phénomènes et des concepts inaccessibles à nos sens du quotidien. La réalité est complexe, et les modèles peuvent aider à simplifier les choses et à les rendre plus faciles à gérer et à comprendre.
Justus von Liebig (1803-1873) a utilisé l’analogie d’un tonneau (Figure 1) pour expliquer l’effet des nutriments limitant sur la croissance des plantes. La hauteur de l’eau représente la croissance de la plante et chacune des planches en bois représente un des nutriments dont la plante a besoin pour grandir. Dans cet exemple, le taux de croissance est limité par le potassium, K. |
Les enseignants qualifiés utilisent tout le temps des modèles pour faire des ponts entre les idées initiales des élèves et la nouvelle compréhension à laquelle ils doivent accéder. Les modèles sont des façons de penser la « chose réelle », et il en existe de nombreux types (voir Encadré 1). En étant explicite sur les modèles, vous pouvez aider vos élèves à comprendre leur propre réflexion. En les invitant à commenter et à améliorer les modèles, vous pouvez leur donner des informations supplémentaires.
Encadré 1 : Les modèles fréquemment utilisés par les enseignants
Les modèles souvent utilisés par les enseignants incluent :
Les modèles souvent utilisés par les enseignants incluent :
- Les modèles en trois dimensions – par exemple, un modèle en plastique avec boules et bâtonnets d’une molécule organique, ou un modèle en plastique coloré du système circulatoire humain ;
- Les modèles écrits et verbaux – par exemple, des analogies comme l’écoulement de l’eau pour le courant électrique ;
- Les modèles mathématiques – par exemple, les équations du mouvement et les formules chimiques ;
- Les visuels – comme les graphiques, les schémas et les animations ;
- Les modèles numériques – comme les simulations de la croissance d’une population.
Où sont les preuves ?
La recherche montre que la modélisation est répandue dans l’enseignement des sciences. Les études se concentrent généralement sur la manière d’optimiser l’utilisation des modèles plutôt que sur la valeur des modèles eux-mêmes. Les données suggèrent que :
- Les idées sur lesquelles reposent les modèles doivent être familières aux élèves, faute de quoi ils pourraient plus les embrouiller qu’autre chose ;
- Il est important que les élèves comprennent en quoi les modèles diffèrent de l’idée enseignée et apprennent l’idée sous-jacente plutôt que le modèle.
Utilisez des modèles pour aider les élèves à développer une compréhension approfondie des concepts scientifiques
La connaissance scientifique est difficile à apprendre, car nous évoluons constamment entre les observations que nous pouvons faire avec nos sens, les explications des observations et la représentation symbolique de ces explications. Vous pouvez utiliser des modèles pour lier des observations à des explications et des représentations.
L'idée de trois niveaux de connaissances scientifiques a été développée pour la première fois par Alex Johnstone, qui l'a initialement utilisée pour expliquer les trois niveaux de connaissances en chimie. La figure 2 montre le triangle de Johnstone.
Le triangle de Johnstone peut être étendu pour inclure tout l’apprentissage des sciences. En physique, les trois niveaux peuvent être « le macro » (par exemple, les objets physiques), « l’invisible » (comme les forces, les réactions et les électrons) et « le symbolique » (formules). En biologie, les trois niveaux peuvent être « le macro » (par exemple, les plantes ou les animaux), « le micro » (comme les cellules) et « le biochimique » (par exemple, l’ADN).
Chacun de ces niveaux aide à créer une compréhension individuelle d’un phénomène, et les scientifiques experts développeront une compréhension qui combine les trois niveaux. Cependant, les élèves opèrent souvent au niveau macroscopique et ont du mal à relier leurs expériences du phénomène aux niveaux infra-microscopique et symbolique - d’autant qu’ils ne peuvent pas observer ces deux niveaux. Les modèles aident les élèves à relier les observations aux niveaux infra-microscopiques et symboliques et à construire une compréhension plus riche.
L'idée de trois niveaux de connaissances scientifiques a été développée pour la première fois par Alex Johnstone, qui l'a initialement utilisée pour expliquer les trois niveaux de connaissances en chimie. La figure 2 montre le triangle de Johnstone.
Le triangle de Johnstone peut être étendu pour inclure tout l’apprentissage des sciences. En physique, les trois niveaux peuvent être « le macro » (par exemple, les objets physiques), « l’invisible » (comme les forces, les réactions et les électrons) et « le symbolique » (formules). En biologie, les trois niveaux peuvent être « le macro » (par exemple, les plantes ou les animaux), « le micro » (comme les cellules) et « le biochimique » (par exemple, l’ADN).
Chacun de ces niveaux aide à créer une compréhension individuelle d’un phénomène, et les scientifiques experts développeront une compréhension qui combine les trois niveaux. Cependant, les élèves opèrent souvent au niveau macroscopique et ont du mal à relier leurs expériences du phénomène aux niveaux infra-microscopique et symbolique - d’autant qu’ils ne peuvent pas observer ces deux niveaux. Les modèles aident les élèves à relier les observations aux niveaux infra-microscopiques et symboliques et à construire une compréhension plus riche.
Encadré 2 : Le triangle de Johnstone pour les 3 niveaux de connaissances en chimie.
Les trois niveaux de description sont :
- le macroscopique – comprenant les connaissances descriptives acquises par l'expérience, soit directement (par nos sens), soit indirectement (par la mesure), par exemple : Le gaz naturel brûle en présence d'air et peut être utilisé pour réchauffer les choses ;
- l’infra-microscopique – comprenant les modèles explicatifs que les scientifiques ont développés pour donner un sens aux observations au niveau macroscopique ; on ne peut pas observer directement les choses à ce niveau. Par exemple : Le gaz naturel est principalement composé de méthane, un composé chimique qui subit une réaction de combustion avec l'oxygène de l'air, produisant deux nouvelles substances, le dioxyde de carbone et l'eau, et libérant de l'énergie sous forme de chaleur et de lumière ;
- le symbolique – comprenant les symboles chimiques, les formules et les équations mathématiques : CH4 + 2O2 → CO2 + 2 H2O + énergie.
Sélectionnez avec soin les modèles que vous utilisez
En tant que professeur de sciences, vous avez de nombreux modèles dans votre répertoire. Les modèles ne devraient être utilisés que s’ils facilitent la compréhension – et il existe de nombreux concepts qui peuvent être enseignés sans utiliser de modèles.
Réfléchissez bien aux modèles que vous allez utiliser avant, pendant et après les cours. L’approche FAR (Focus, Action et Réflexion) (Encadré 2) est une méthode pratique pour s’interroger.
Assurez-vous que les élèves connaissent l’idée sous-jacente sur laquelle repose le modèle prévu. Si le modèle est tout aussi inconnu que le nouveau concept enseigné, le modèle peut gêner plutôt que faciliter l’enseignement.
Réfléchissez bien aux modèles que vous allez utiliser avant, pendant et après les cours. L’approche FAR (Focus, Action et Réflexion) (Encadré 2) est une méthode pratique pour s’interroger.
Assurez-vous que les élèves connaissent l’idée sous-jacente sur laquelle repose le modèle prévu. Si le modèle est tout aussi inconnu que le nouveau concept enseigné, le modèle peut gêner plutôt que faciliter l’enseignement.
Encadré 3 : L'approche FAR pour utiliser des modèles (adapté de Treagust et al., 1998)
Enseignez explicitement aux élèves les modèles et apprenez-leur à les critiquer
Pour que les élèves tirent le meilleur parti des modèles, ils ont besoin de comprendre comment les modèles se rapportent à la réalité et pourquoi ils sont utilisés. C'est une étape importante pour développer leur capacité à « raisonner comme un scientifique ».
Les trois niveaux pour comprendre la « nature des modèles » sont :
Les trois niveaux pour comprendre la « nature des modèles » sont :
- débutant - « Je pense que les modèles sont une copie directe de la réalité et je ne vois pas en quoi ils diffèrent de la réalité » ;
- intermédiaire - « Je comprends que les modèles ne sont pas des copies directes de la réalité et je comprends que les modèles sont utilisés pour m'aider à développer ma compréhension scientifique » ;
- expert - « Je sais que plusieurs modèles différents peuvent être utilisés pour expliquer différents aspects d'une idée ; je comprends que les modèles ont des atouts et faiblesses et que les modèles existants peuvent être modifiés et améliorés. Je sais que les modèles peuvent être utilisés pour tester des idées et sont créés à des fins spécifiques ».
Évitez que les élèves apprennent le modèle plutôt que le concept qu'il est censé expliquer. Vous pouvez le faire en orientant explicitement les élèves vers les similitudes et les différences entre le modèle et le concept.
Une façon d'y parvenir est de leur fournir un large éventail de types de modèles, puis à les inviter à comparer les modèles existants. Par exemple, ils pourraient comparer trois modèles représentant l'ADN, ou le courant électrique (voir Encadré 3).
Une façon d'y parvenir est de leur fournir un large éventail de types de modèles, puis à les inviter à comparer les modèles existants. Par exemple, ils pourraient comparer trois modèles représentant l'ADN, ou le courant électrique (voir Encadré 3).
Encadré 3 : Différents modèles du courant électrique et leurs limites
Le modèle du circuit d'eau Trois modèles sont couramment utilisés pour le courant électrique : le modèle du circuit d’eau, le modèle de la corde et le modèle du fourgon de livraison. Le modèle du circuit d’eau est un modèle auquel les élèves peuvent facilement s’identifier. Cependant, ils doivent être conscients des différences avec leurs expériences quotidiennes avec de l’eau et des tuyaux. Par exemple, contrairement à l’eau sortant de la plomberie par les robinets, l’électricité ne peut pas quitter le circuit. |
Le modèle de la corde Le modèle de la corde est utile pour développer l'idée de flux d'énergie et pour montrer la constance du courant dans un circuit. Pourtant, ce modèle a une utilisation limitée car il n'y a pas de composant dans le circuit qui effectue le transfert d'énergie. C'est concret : les élèves peuvent se tenir en cercle et tenir et sentir la corde et cela peut démontrer un chauffage dans un circuit électrique. |
Le modèle du fourgon de livraison Le modèle du fourgon de livraison est utile pour montrer que le mouvement des électrons dans un circuit s'accompagne d'un transfert d'énergie. La limitation ici est que l'énergie est vue comme une substance plutôt qu'un concept. Il est également important que les fourgons de livraison soient considérés comme étant en ligne continue plutôt qu’avec des espaces entre eux, sinon le modèle ne décrit pas comment les électrons se déplacent autour du circuit. |
Le but ici n’est pas de choisir le "bon" modèle, mais d’utiliser la comparaison entre les modèles pour aider les élèves à développer une compréhension à la fois du concept et de la nature des modèles.
Lors de la discussion des trois modèles, les questions de discussions typiques peuvent être :
• Dans chaque modèle, comment représenteriez-vous :
- Une augmentation du courant ?
- Une augmentation de la tension ?
• Quel modèle trouvez-vous le plus utile ? Pourquoi ?
• Comment pourriez-vous améliorer les modèles ?
• Comment pourriez-vous développer chaque modèle pour représenter le courant alternatif ?
Lors de la discussion des trois modèles, les questions de discussions typiques peuvent être :
• Dans chaque modèle, comment représenteriez-vous :
- Une augmentation du courant ?
- Une augmentation de la tension ?
• Quel modèle trouvez-vous le plus utile ? Pourquoi ?
• Comment pourriez-vous améliorer les modèles ?
• Comment pourriez-vous développer chaque modèle pour représenter le courant alternatif ?
Une grille d'auto-évaluation pour progresser
Pour aller plus loin
Gilbert, J. K. and Justi, R. (2016) Modelling-based Teaching in Science Education, Switzerland: Springer International.
Ce livre fournit des détails sur la recherche dans ce domaine et sur comment mieux utiliser les modèles comme une part entière de l’enseignement des sciences.
Ce livre fournit des détails sur la recherche dans ce domaine et sur comment mieux utiliser les modèles comme une part entière de l’enseignement des sciences.
Retrouvez ici cet article au format .pdf :
iss_3_modélisation.pdf |
La semaine prochaine, nous parlerons des techniques pour favoriser la mémorisation appliquées à l'enseignement des sciences.